Le Petit Cephalophore

dimanche, octobre 05, 2014

Petite histoire des formes du mariage, du droit romain au code civil...

Parmi tous les droits de l’Antiquité qui connaissent un mariage dit « par étapes », c'est-à-dire un mariage qui s'opère sur la durée, commençant avec les conventions patrimoniales entre les deux familles et trouvant sa perfection dans l’union charnelle (c’est pourquoi Marie est déjà tenue à la fidélité envers son époux Joseph alors qu’elle vit encore chez ses parents), seul le droit romain conçoit le mariage comme un acte unique formé par le seul échange de consentement des époux (ou de leur pater familias s’il existe). La pronuba, digne matrone représentant Junon, déesse de la fécondité et épouse de Jupiter, invite les époux à exprimer leur accord en unissant leurs mains droites, signe de leur volonté de mener une communauté de vie et de partager tout ce qui relève du droit humain et du droit sacré (tel le culte domestique). 
Ce mariage consensuel romain est le modèle que retiendra le droit canonique naissant, lorsque l’Empire devient chrétien. Ainsi, deux chrétiens sont valablement mariés dès lors qu’ils ont échangé leur « oui ». (Les parents ne jouent plus qu’un simple rôle de conseil, dans le respect du principe canonique de la liberté matrimoniale.) Un prêtre peut être présent, qui remplace l’ancienne pronuba et bénit les époux, mais ce n’est pas nécessaire à la validité du mariage : les époux sont les « ministres du sacrement ». La présence du prêtre ne sera pas exigée avant le XVIème siècle : à partir du XIIIème siècle, le mariage est définitivement qualifié par le droit canonique comme étant à la fois un contrat et un sacrement, un contrat qui certes, n’est pas tout à fait comme les autres parce que son objet n’est pas simplement matériel, mais un contrat tout de même, qui se forme par le seul accord de volonté des époux. Du coup, pour échapper à la pression familiale, ou mus par de plus vils intérêts, nombreux sont ceux qui se marient en secret, sans autre témoin que le Seigneur lui-même. Mais ces mariages clandestins, quoique conformes au principe selon lequel seuls les époux sont les ministres du sacrement, ne sont pas du tout du goût de l’Eglise, en raison de la difficulté de prouver l’existence même du mariage. Et l’on voit ainsi nombre de tristes sires qui, ayant épousé une femme et s’en étant lassés, en épousent une autre prétextant que la première n’était pas épousée, et les voilà bigames… Les évêques n’ont donc de cesse d’encourager les futurs époux à se marier à l’église, devant témoins et avec la bénédiction du curé. Le IVème concile de Latran, en 1215, interdit fermement ces mariages clandestins. Une interdiction qui demeure insuffisante, car elle ne prévoit pas de sanction. Le mariage consensuel, quoique clandestin, est donc toujours valide aux yeux de l’Eglise et des droits séculiers, à une époque où le mariage relève du monopole du droit canonique. Le problème n’est donc pas résolu...

Au XVIème siècle s’opère la véritable rupture : soutenu par les Etats catholiques, le concile de Trente réforme la nature juridique du mariage : le seul consentement des époux ne suffit plus à former le lien matrimonial, il faut en outre respecter certaines formalités, cette fois sous peine de nullité. Le mariage devient un contrat solennel. Sont exigés désormais : la publication des bans dans les paroisses des époux, la présence de témoins et du prêtre lors de l’échange des consentements (qui se fait généralement à l’église) et l’inscription du mariage sur les registres paroissiaux, ce qui permet de prouver le mariage de manière irréfutable.


En France, c’est la Révolution qui va poser la distinction entre mariage civil et mariage religieux. Dès 1791, le droit français ne connaît plus que le mariage civil, qui reprend les formes du concile de Trente en les laïcisant (!), le maire remplaçant le prêtre. Enfin, suite au concordat de 1802 conclu entre Bonaparte et le pape Pie VII, seuls des époux mariés civilement peuvent être admis au mariage religieux. Voilà pourquoi il faut aujourd’hui se marier devant Monsieur le maire avant de se marier devant Messieurs les curé, pasteur, rabbin ou autres : une subordination du mariage religieux qui n’a pas posé de difficulté tant que la conception du mariage était la même en droit civil qu'en droit canon…
DT


 

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