Le Petit Cephalophore

dimanche, juin 18, 2006

La paroisse et les séminaristes

Qu’est-ce que la vie paroissiale pour un séminariste ? Luc Reydel et Paul racontent leurs deux années passées à Saint-Denys.
Entretien avec Luc : Avant d’entrer au séminaire, Luc était déjà un paroissien actif, engagé dans le catéchuménat et toujours volontaire pour s’occuper de la logistique, porter les cartons et accueillir les paroissiens qui suivaient avec lui la catéchèse des adultes, tous les quinze jours. Il connaît donc bien la vie paroissiale et en vit même au point de se revendiquer avec force comme "paroissien lambda", un baptisé parmi les baptisés, en chemin vers la sainteté. Qu’est-ce qui a changé alors ? Le regard qu’il pose sur son implication. "Je suis davantage "dans" et à la fois "en dehors" de la paroisse. Davantage en elle, car suivre le Christ c’est se donner concrètement, toujours plus. Davantage hors d’elle, car cette suite est aussi un chemin intérieur du Totus Tuus (tout à Toi) vers le "tout à tous". Ce chemin invite à se détacher de son propre désir dans la rencontre avec l’autre, afin de tendre vers Dieu pour servir gratuitement, à l’imitation du Christ. Je mesure combien, pendant ces deux ans, j’ai été aimé gratuitement par Dieu ; un amour qui passe par les actes gratuits des paroissiens, les sourires, les mots, les petits et même les grands gestes… Cette gratuité de l’amour des paroissiens m’invite à me donner moi-même. La paroisse, c’est le quotidien de ma vie parce qu’elle est le lieu de l’Eucharistie". Luc aime en particulier la messe dominicale de 11 h, où se dévoile, à travers les membres rassemblés du Corps du Christ, la vérité du mystère de l’Église. Comme beaucoup d’entre nous, Luc est donc un paroissien heureux ! Comme nous, donc ? Pas tout à fait, pourtant. Nous voyons déjà en lui le futur prêtre, nous projetons en lui l’avenir de l’Église : voilà la relève ! Notre espérance s’incarne dans ce "paroissien lambda" que nous imaginons déjà ordonné… Or cet élan peut être une épreuve pour celui qui en est l’objet. Que devient, face à cette anticipation, la liberté du séminariste ? Luc accueille ce regard comme un appel à poursuivre le don de lui-même sous le regard le plus déterminant : celui du Christ. Luc quittera l’an prochain Saint-Denys pour gagner une autre Maison de Séminaire : comment accepter ces continuels départs ? "Le départ est significatif de l’appel : un appel à se détacher de l’homme ancien pour "s’attacher" au Christ. Suivre le Christ, c’est l’essentiel de la mission. Un chrétien qui suit le Christ ne peut pas faire autre chose qu’ouvrir son cœur au cœur de son prochain, au cœur de celui qui est aimé de Dieu et qui ne le sait pas. Plus je connais Dieu, plus je le découvre comme source de bonheur et plus je veux le partager."
Témoignage de Paul :
Phénomène original à Paris et plus encore en France, la présence d’une communauté séminaristes ne manque pas, semble-t-il, de toucher les paroissiens de Saint-Denys. Pourtant, la paroisse est peut-être ce qui a pris pour moi les apparences du plus grand invariant dans ma nouvelle vie. Ancien paroissien et animateur d’aumônerie à Sainte-Elisabeth, qui jouxte le territoire de Saint-Denys, j’ai retrouvé ici un quartier et un engagement paroissial somme toute assez proches, puisque j’ai hérité des servants d’autels puis d’une équipe KT de CE2. En terme de temps, la paroisse ne me prend pas davantage qu’autrefois, la majeure partie de mon énergie de séminariste étant employée dans les études et la vie communautaire. Comme beaucoup de paroissiens, c’est donc essentiellement à l’occasion de la messe dominicale mais aussi des « pots » qui lui succèdent fréquemment que j’ai pu vous rencontrer, et c’est surtout avec ceux qui ont une activité en commun avec moi ou ont des enfants catéchisés ou servants d’autel, que j’ai pu nouer des relations d’amitié. Autant de rencontres fraternelles qui sont un véritable bonheur et m’ont permis de me sentir encore l’un de vous, paroissien presque ordinaire, et de prendre quelques bains de « vraie » vie, hors du petit monde séminaristico-clérical. Pour autant, une somme de petits décalages témoignaient de la mue progressive de ma vie, y compris comme paroissien. Spatialement d’abord. Logeant au presbytère, j’ai eu la joie de croiser fréquemment quelques paroissiens peu ordinaires, qui s’activent au chevet de l’église : Marie-Hélène au jardin, Jacques à la liturgie, Denise aux fleurs et à la bibliothèque…. Surtout, contrairement à beaucoup d’entre vous, je n’entre presque jamais dans l’église par la façade mais toujours par la sacristie, et reste dans le chœur, en aube, le dimanche à la messe. Temporellement ensuite, la pratique religieuse des séminaristes est parfois un peu décalée par rapport à celle de la plupart des paroissiens ; nous chantons par exemple les laudes et les vêpres presque chaque jour dans l’église, mais à des horaires peu chrétiens pour qui ne vit pas sur place ! A plus long terme, je sais de façon certaine que, contrairement à vous, il me faudra bientôt quitter pour toujours cette paroisse après deux ans passés ici. Et c’est ce détachement qui est finalement le plus difficile, signe concret du don de ma vie. Car pour le reste, le climat paroissial est tellement chaleureux et familial à Saint-Denys qu’il est à la limite de la publicité mensongère en faveur des vocations sacerdotales ! Paul


 

Le référenceur des meilleurs sites catholiques francophones
Blogues_Catholiques
Rejoindre la chaîne | Liste | Précédent | Suivant | Hasard | Paroisse francophone St-Blogue
Joindre | Liste | Précédent | Suivant | Au hasard